La polémique enflait depuis bientôt deux ans. Le Parc National des Pyrénées voulait offrir aux visiteurs un nouvel espace d’accueil dans le village de Gavarnie. Il comptait pour cela détruire l’actuel bâtiment d’Edmond Lay et confier la reconstruction à la star japonaise de l’architecture Kengo Kuma. La Préfecture des Hautes-Pyrénées a rejeté la demande au motif de la non-conformité du projet avec les exigences du site Patrimoine Remarquable.

Qui est la star mondiale de l’architecture Kengo Kuma ?
Kengo Kuma est un architecte japonais de 70 ans connu pour un bon équilibre entre urbanisme et respect de la nature. Il crée la boutique LVMH à Osaka en 2004, ou le remarquable office de tourisme d’Asakusa en 2012, mais aussi un immeuble de l’université de Tokyo, et en 2019 le grand stade de Tokyo.
Qui est l’architecte bigourdan Edmond Lay ?
Originaire de Barbazan-Debat, Edmond Lay (1930-2019) y a installé son atelier. Il est l’un des maîtres de l’architecture organique française. Respect de la nature, du contexte, du paysage ressortent de son œuvre. Il obtient la récompense suprême en France en 1984, le Grand Prix national de l’architecture. Il est célébré notamment pour la Caisse d’épargne de Bordeaux, classée monument historique. À Tarbes, on connaît mieux la résidence Le Navarre, la bibliothèque/ludothèque de Laubadère, le pavillon de la place au Bois ou encore le château Bouscassé d’Alain Brumont.
Pourquoi il faut conserver ce bijou d’architecture pyrénéenne ?
Le site spécialisé AMC archi évoque « son grand toit protecteur à double pente couvert d’ardoises, ses menuiseries bois soigneusement dessinées, et ses escaliers semblables à des sentiers ». Bref, des marqueurs de l’architecture de montagne à… 1 380 m d’altitude. Et un site même pas délabré.

Pourquoi le projet de Kengo Kuma est décrit comme hors-sol ?
Avec le goût du jour, la construction d’Edmond Lay paraît anachronique. On est toujours ringards entre deux modes (ceux qui portent encore des slims, votre heure viendra). Le Parc National voulait conserver cette vue panoramique sur le cirque de Gavarnie, Site Classé en 1921 et patrimoine mondial de l’Unesco, et y mettre une architecture décrite comme un « parallélépipède de verre à toit plat » évoquant des feuilles. Les associations mobilisées (Parcours d’architecture, Architecture 65, Sites et monuments, Patrimoine, environnement et solidarité des Pyrénées) dénoncent une « contradiction flagrante avec les principes de la Charte du Parc National des Pyrénées », un projet inutile et financé à hauteur de 3,5 millions d’euros par le ministère de la Transition écologique.
